MOYENS DE LUTTE

choix des cultures et des variétés      pratiques culturales    lutte chimique      lutte raisonnée ou intégrée contre le piétin verse

 

  Choix des cultures et des variétés (méthode préventive)

  Les risques du développement du piétin verse et du piétin échaudage sont plus importants dans une parcelle agricole lorsque celle-ci a été cultivée les années antérieures avec une plante sensible qui a permis la formation d’un stock d’inoculum.

  Donc éviter la monoculture et éviter de cultiver plusieurs années de suite des cultures sensibles (en particulier les céréales à paille : blé, orge, avoine, triticale) limite les risques. Cela peut se traduire par l’introduction dans la rotation culturale sur une parcelle d’autres cultures comme du maïs ou des protéagineux (pois) ou des oléagineux (colza, tournesol) à condition de limiter les résidus de récolte de ces cultures. Sans aller jusqu’à la monoculture, les rotations culturales dans lesquelles les cultures sensibles reviennent plus souvent présentent toujours plus de risque. Du fait de leur sensibilité différentes aux piétins, la succession blé-orge est tout à fait classique, tandis que la succession orge-blé n’est jamais pratiquée.

  Dans l’ensemble des variétés de céréales à paille, en particulier le blé, il existe des sensibilités différentes aux piétins, notamment au piétin verse. Par exemple la variété de blé Roazon a été la première pour laquelle une moindre sensibilité a été revendiquée. Mais du fait des difficultés liées aux caractéristiques de ces maladies et aux enjeux économiques ; qui ne sont pas prépondérants dans ce cas, les sélectionneurs ne concentrent pas leurs efforts sur la recherche de variétés résistantes aux piétins. De plus, le choix est plus vaste pour les maladies de type « rouille » pour lesquelles la gamme de sensibilité est plus large. Enfin, il apparaît que les variétés tardives présentent plus de risques que les variétés précoces, en particulier pour le piétin échaudage, la culture risquant d’être en contact plus longtemps avec la maladie et l’échaudage a plus de chances de se manifester en fin de végétation.

  Pratiques culturales (méthodes préventives)

  Du fait du mode de propagation des piétins, il est important que l’inoculum soit le plus réduit à l’automne, pour cela il faut éviter toutes les situations qui lui permettent de subsister et de se développer, en particulier en évitant de laisser des résidus de récolte (chaumes) ou des repousses de céréales à paille ou des adventices (en particulier des graminées), à la surface du sol. Ceci est possible par l’enlèvement des pailles et le travail du sol (labour ou passage d’instruments à disques ou à griffe : déchaumage, hersages) ou éventuellement par l’utilisation d’herbicides. Les techniques de semis directs sont donc à déconseiller en particulier si d’autres facteurs de risque existent (cultures précédentes sensibles par exemple).

  On peut aussi privilégier des semis plus tardifs et moins denses. Les semis précoces augmentent toujours les risques d’attaques précoces des piétins qui sont généralement plus grave. Mais dans ce cas l’espérance de rendement est souvent moindre en conditions normales. Les semis trop profonds augmentent les risques de contamination par le piétin échaudage du fait de la progression du mycélium dans le sol à l’automne.

  D’une façon générale la fertilisation azotée favorise le développement des maladies du pied des céréales, comme souvent celui des champignons parasites des cultures. L’apport d’azote sous forme nitrique (NO3-) et le chaulage (apport de CaO) semblent favoriser le développement du piétin «échaudage, par contre l’apport d’azote ammoniacal (NH4+), d’engrais phosphatés ou potassiques (surtout s’il s’agit de chlorure de potassium KCL) le limite.

  Lutte chimique (méthodes préventives ou curatives)

  Elle n’est possible qu’en utilisant des produits, dits fongicides, qui ont été spécifiquement autorisée par le ministère de l’agriculture, qui ne peut le faire qu’après s’être assuré de leur innocuité et de leur efficacité dans les conditions d’emploi préconisées.  Pour ce faire sont exigées des études de toxicité pour l’homme, les animaux (toxicité directe ou indirecte par accumulation dans la chaine alimentaire) et pour l’environnement (en particulier pour évaluer les risques de pollution des sols, des eaux et de l’air).

  Ces produits peuvent être utilisés de façon préventive, en traitement de semence (le produit est mélangé aux semences avant le semis) ou en végétation (le produit est mélangé dans de l’eau et pulvérisé sur la culture) avant que la maladie s’installe, ou de façon curative. Ils sont constitués d’une ou plusieurs substances actives (molécules qui ont un effet fongicide) et de différents adjuvants de fabrication destinés notamment à améliorer l’efficacité de ces substances actives (en augmentant la mouillabilité des gouttes pulvérisées sur les feuilles, elles s’étalent alors encore plus, ou en augmentant leur pouvoir de pénétration dans les organes végétaux) ou à favoriser l’utilisation du produit, en augmentant par exemple leur solubilité dans l’eau.

  Ce sont les seuls traitements fongicides autorisés contre cette maladie. Les traitements en végétation n’ont jamais démontré leur intérêt. Une seule substance active est actuellement autorisée (seulement depuis 1999), uniquement sur le blé : le fluquinconazole. Il appartient à la famille chimique des triazoles, il est symétrique (pénètre t migre dans la plante, donc peut la « soigner » ou la protéger de l’intérieur et pourra protéger les organes végétaux au fur et à mesure de leur formation) et agit en inhibant la synthèse de l’ergostérol et perturbant le fonctionnement et la formation des membranes cellulaires chez le champignon. Il agit également contre d’autres maladies transmissibles par la semence : carie, septorioses, rouilles brune et jaune.

  D’autres produits à base d’une autre  substance active, le silthiofam, qui semble particulièrement intéressante, sont actuellement mis au point. Cette substance active d’une famille chimique apparentée aux amides (silyl amides) est un stimulateur des défenses naturelles d’origine biologique qui agit en empêchant le transport d’ATP des mitochondries, entraînant un arrêt de la croissance du champignon. 

  Ils ne sont autorisés que pour le blé et le triticale (céréale créée par l’homme par hybridation de blé et de seigle). Les substances actives autorisées en France contre le piétin verse sont indiquées dans le tableau suivant. La plupart de ces molécules présente une efficacité certaine sur le piétin verse. Le traitement contre le piétin verse a lieu précocement au printemps, en mars ou en avril.

substances actives famille chimique effet sur le champignon mode d'action observations
carbendazine carbamates-benzimidazoles empêche la sporulation Sy Pr Cu actif 2 à 3 semaines, véh
      Pé Pr Cu iculé par la sève brute
prochlorase imidazoles bloque la synthèse des stérols Sy Pr Cu actif 4 à 6 semaines, actif
      Sy Pr Cu Er sur plusieurs souches de
      Sy Pr Cu Er piétin verse
bromuconazole triazoles bloque la synthèse des stérols Sy Pr Cu actif sur de nombreuses
      Sy Pr Cu Er  souches de piétin verse
cyproconazole     Sy Pr Cu Er persistant
fenbuconazole     Sy Pr Cu  
fluquinconazole     Sy Pr Cu Er persistant, gêne le foncti
      Sy Pr Cu Er onnement des membranes
      Sy Pr cellulaires
flusilazol     Co Sy Pr Cu persistant, actif sur de
      Co Pr Er nombreuses souches de
         piétin verse
flutriafol       actif 4 semaines
propiconazole       actif 4 à 6 semaines
tébuconazole       actif 4 à 8 semaines,
        bloque la synthèse des
        stérols sur 2 sites
tétraconazole       actif 5 à 7 semaines
acibenzolar-s-méthyl benzothiadiazoles stimule les défenses naturelles   véhiculé par la sève brute
    de la culture   et la sève élaborée
cyprodinil pyrimidinamines inhibe l'élongation des tubes   actif sur de nombreuses
     germinatifs et hypes mycéliens    sopuches de piétin verse
krésoxim-méthyl strobilurines inhibe la respiration   persistant, produit issu
mitochondriale par blocage d'un champignon
du transfert des éléctrons
sur le cytochrome b

                                          d'après le guide pratique de défense des cultures-ACTA

Ces substances actives sont également efficaces contre d’autre maladies, en particulier les fusarioses, les septorioses, l’oïdium ou les rouilles. Dans les produits autorisées , elles sont souvent associées à d’autres substances (soufre, thiophanate méthyl, chlorothalonil, manèbe, fenpropimorphe, tridémorphe, fenpropidine, épiconazole, triadimefon) pour augmenter l’efficacité contre ces autres maladies.

  Seule la première intervention fongicide concerne directement le piétin verse au stade début montaison de la céréale (début de l’élongation de la tige) , il peut y en avoir une ou deux contre les maladies de la tige, des feuilles et des épis, aux stades gonflement (fin de la montaison) et épiaison (apparition de l’épi).

  Les traitements fongicides contre le piétin verse doivent tenir compte de l’apparition de souches résistantes de ce champignon. C’est à<partir des années 1980 que sont apparues pour la première fois dans les grandes cultures des phénomènes de résistance de grande ampleur pour le piétin verse. Les fongicides couramment utilisés à l’époque, de la famille des carbamates (bénomyl, carbendazime notamment) se sont avérés dans certaines situations de moins en moins efficaces. Des résistances de tapesia yallundae (souches rapides)  aux triazoles sont apparues dès 1985, puis de souches lentes (tapesia acufornis) au prochloraze vers 1991. en 1992 au laboratoire ont été détectées des souches rapides résistantes aux triazoles et prochloraze. D’ailleurs depuis, les souches lentes qui étaient majoritaires n’ont cessé de régresser au profit des souches rapides.

  Pour limiter ces risques d’apparition de résistances, il est recommandé sur une même parcelle d’alterner dans le temps les substances actives utilisées, en particulier les plus utilisées : prochloraze, flusilazol et cyprodinil.

  La lutte raisonnée ou intégrée contre le piétin verse

  De l’utilisation de traitements systématiques ou de traitements décidés suite à l’observation minutieuse des premiers symptômes dans les parcelles , on est passé, en particulier dans les zones où le piétin verse pose le plus de problèmes (Poitou, franche comté, Bourgogne) à une méthode globale de raisonnement basée sur l’utilisation :

-       de méthodes d’utilisation du risque à la parcelle, en prenant en compte les paramètres agronomiques (type de sols, précédents culturaux, date de semis notamment)

-       d’analyses de laboratoires pour apprécier la quantité d’inoculum disponible en début de campagne : tests ELISA (Enzyme Linked Immono-adSorbant Assay) basés sur des interactions immunologiques spécifiques antigène s/anticorps, et, plus récemment , technique PCR (Polymérase Chain Reaction) qui permet une détection plus précoce de la maladie grâce à la production d’ADN à partir d’un échantillon prélevé sur une plante et à une quantification utilisant des colorants fluorescents spécifiques.

-       De modèles mathématiques qui simulent (à partir en particulier de données climatiques simples comme les précipitations et les températures minima et maxima sous  abri) le développement de la maladie et permettent de prévoir les risques d’infestation.

  En fonction de l’ensemble de ces éléments, il est possible d’apprécier <les risques en début de saison et de prévoir l’évolution de la maladie et donc les traitements à effectuer. Des systèmes d’avertissements agricoles pour les agriculteurs ont été mis en place sur cette base

                                                                                                   d'après [6] [3] [5]