Objectifs et application de symbiose rhyzobium-légumineuse


 

L’utilisation comme engrais verts  

Photo ci-dessous : Cet agriculteur de l'état de Washington enfoui du trèfle d'odeur (Melilotus sp.) tous les trois ans pour améliorer la structure physique du sol (apport de matière organique) et l'enrichir en azote organique. John Reganhold, Scientific American 262(juin 1991) p.115.

   

 Une grande partie des sols tropicaux sont pauvres en azote et de nombreux pays n’ont pas les moyens d’utiliser des engrais azotés chimiques qui coûtent chers et qui sont parfois contraignants à utiliser, du fait qu’ils sont facilement lessivables. L’utilisation de légumineuses dans les systèmes de culture utilisant les rotations puis l’enfouissement des résidus de récolte ou des plantes entières permet d’accroître la teneur en azote organique du sol. En effet, les résidus des légumineuses sont beaucoup plus riches en azote et contribuent à enrichir le sol en cet élément. Les cultures qui succèdent aux légumineuses pourront donc bénéficier de l’azote fixé et libéré progressivement par la décomposition des résidus enfouis dans le sol. L’azote issu de la fixation symbiotique est beaucoup plus adapté à l’agriculture des pays en développement comparativement aux engrais chimiques azotés.

 

    En effet, il a été observé que l’azote atmosphérique contribue à 50 à 60% de l’azote des légumineuses à graines, de 70 à 80% de l’azote des légumineuses fourragères et de 55 à 60% de l’azote des arbres fixateurs d’azote.

    L’utilisation de légumineuse présente donc un gros avantage économique et environnemental. De nombreuses études démontrent l’intérêt de l’utilisation des légumineuses et de leurs associations avec le rhizobium. Nous verrons ici deux exemples illustrant les objectifs principaux.

    Sesbania rostrata est une légumineuse tropicale, originaire d’Afrique de l’Ouest, qui pousse dans les sols humides et les marécages. Elle a une vitesse de croissance exceptionnelle lors de la saison des pluie (environ 10cm/jours). Les nombreux nodules fixateurs d’azote présents à la fois sur les racine et la tige lui permettent d’accumuler de grandes quantités d’azote. Ces propriétés en font donc un excellent engrais vert. En effet, les différences de rendement dues à l’utilisation ou non de cette association sont flagrants.

    Des essais ont été réalisés en Inde et ont donné les résultats suivants : les rendements étaient de 4 t/ha pour les parcelles ayant eut un précédent de Sesbania rostrata et de 1.7 t/ha pour les parcelles témoin.

    On peut remarquer qu’en Asie, Sesbania était traditionnellement utilisée comme engrais vert dans les rizières. Elle a été peu à peu remplacée par les engrais chimiques, ce qui a provoqué une montée de la pollution en nitrate des sols et des problèmes associés (pollution des cours d’eau voir eutrophisation). Par contre, en Afrique où les pays n’ont généralement pas les moyens d’utiliser des engrais chimiques et où il n’y a pas de tradition d’utilisation de Sebania, l’introduction de ce type de pratique culturale reste difficile.

 

Bradyrhizobium photosynthétiques et riziculture

    Il a été observé dans des écosystèmes particuliers, comme des terrains inondés, des mares ou au bord de cours d’eau des régions ouest-africaine, des tiges de légumineuses du genre Aeschynomene qui ont la particularité de présenter des nodules induits par des bactéries du genre Bradyrhizobium. Par la suite, un programme ayant pour finalité un développement durable de la riziculture des pays du Sud où les rendements en riz sont faibles et où la symbiose avec les Bradyrhizobium et les Aeschynomenes qui poussent au milieu des plants de riz constituent un engrais vert naturel. En effet, lorsqu’elles se décomposent, ces légumineuses aquatiques fertilisent le sol des rizières par apport de leurs composés azotés.

    De récents travaux réalisée dans le cadre d’une thèse a montré que des Bradyrhizobium phostosynthétiques colonisaient massivement les racines d’une espèce de riz sauvage, Oryza breviligulata. Ces bactéries ont été inoculées à plusieurs espèces cultivées (O. sativa, O. glaberrima) en serre L’inoculation s’est révélée très bénéfique à la croissance du riz : les plants inoculés présentent un système racinaire plus développé (+ 55 % en longueur par rapport aux plants témoins), des tiges plus larges (+ 25%) et le gain de productivité en grains est de l’ordre de 20%.                                      

Photo ci-dessus : Cet agriculteur Rwandais mélange les graines d’une légumineuse à l’espèce appropriée de Rhizobium afin de leur inoculer ces bactéries fixatrices d’azote. Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (ONU), science 250 (9 novembre 1990) p. 748.

Légumineuses et restauration écologique 

    Dans toutes les zones climatiques, on observe que de nombreuses espèces de légumineuses ont la capacité de croître dans des milieux très pauvres, indépendamment de la présence d’élément azoté dans le sol, lorsqu’elles forment des symbioses fixatrices d’azote avec des rhizobiums. Elles sont utilisées dans de nombreux cas de restauration de sols appauvris par l’exploitation intensive, l’érosion ou la désertification (sites miniers, zones arides ou désertiques...). Cette symbiose Rhizobium-Légumineuses fournit chaque année, à l'échelle de la planète, une quantité d'azote équivalente à celle synthétisée par voie chimique dans l'industrie des engrais, et joue donc un rôle écologique et économique considérable.

    Medicago truncatula est une légumineuse annuelle originaire du pourtour méditerranéen qui est nodulée par Sinorhizobium meliloti. Elle présente un intérêt écologique au même titre que le pois ou le trèfle, mais a la particularité d’être plus résistante à la sécheresse et à la salinité. Comme beaucoup d’autres luzernes du même genre (M. polymorpha, M. ciliaris, M. arborea...), on a tenté de les implanter dès les année 80 en Algérie afin d’améliorer la production fourragère. La sélection de légumineuses résistantes à la salinité et leur association avec des rhizobiums locales en font un potentiel très intéressant à exploiter pour la fixation biologique de l’azote dans les régions salées. De plus, la possibilité de repeupler des zones appauvris avec des légumineuses pendant plusieurs années permet de restaurer les sols (formation de matière organique indispensable pour la formation du complexe argilo-humique).

 

Légumineuses et dépollution azotée 

    Dans les pays développés, la sur-utilisation des engrais azotés chimiques a conduit à une pollution des sols, des nappes phréatiques et cours d’eau. Aujourd’hui, la pollution par les nitrates est un problème réellement inquiétant, et la réintroduction de légumineuses s’avère être un bon moyen de limiter la pollution. En effet, la décomposition de la plante ou de ses résidus se fait progressivement, et est mieux adaptée à l’utilisation de l’azote par d’autres plantes. Les pertes azotées par lessivage sont donc limitées, et l’apport d’engrais chimique diminué.