Principales activités microbiennes dans le lait
Les activités métaboliques des microorganismes présents dans le lait peuvent avoir des effets positifs ou négatifs sur l’apparence, l’odeur, la consistance ou la texture et le goût des produits laitiers. Il y a six principales catégories d’activités métaboliques pouvant survenir dans le lait : l’acidification, la production de gaz tels que le dioxyde de carbone, l’alcoolisation, le limonage, la protéolyse et la lipolyse. Rappelons que dans ces conditions contrôlées, certains microorganismes sont responsables de modifications voulues dans les produits laitiers. Par contre, dans les conditions où le contrôle est déficient, les altérations se traduisent par des défauts et des pertes.
Acidification
p : psychrotrophes, m : mésophiles, t : thermophiles, td : thermoduriques, c : coliformes
Principaux microorganismes acidifiants associés aux produits laitiers :
Non producteurs de CO2 |
Producteurs de CO2 |
Streptococcus (m) Lactobacillus (m ou t) lactococcus (certaines espèces) (m) |
Lactobacillus (m ou t) Lactococcus (certaines espèces) (m) Leuconostoc
(m) Microbacterium
(m, td) |
Lors
de leur croissance, certains microorganismes, grâce à la ß-galactosidase, hydrolysent le lactose du lait pour produire deux
nouveaux sucres : le glucose et le galactose. Les bactéries lactiques font
partie de ce groupe. Cette production de composés acides va amener un
abaissement du pH du produit se caractérisant par des odeurs et goûts surs,
pouvant aller jusqu’à la coagulation si on atteint le point isoélectrique de
4,6. Ces microorganismes sont principalement mésophiles. L’acidification du
lait est un bon indice pour évaluer la qualité microbiologique et le respect
de la chaîne du froid du lait cru. C’est pour cette raison que l’industrie
laitière évaluera le pH ou l’acidité titrable du lait à la réception
comme indice de la quantité microbiologique de cette matière première.
Production de gaz
Principaux microorganismes gazogènes associés aux produits laitiers :
lactiques |
Non lactiques |
Lactococcus (m) Leuconostoc (m) Microbacterium
(m, td) |
Escherichia
coli (c, m) Enterobacter (c,m) Clostridium
(t, p, m, td) Levures et moisissures (p, td) Bacillus (t, p, m, td) |
Certaines bactéries lactiques ne produisent que de l’acide lactique lors de la fermentation du lactose. On dit qu’elles sont homofermentaires. Toutefois, d’autres bactéries lactiques produisent du CO2 et d’autres sous-produits en addition à l’acide lactique. On qualifie ces bactéries d’hétérofermentaires ou de gazogènes. Outre les bactéries lactiques hétérofermentaires, il y a aussi des bactéries non lactiques acidifiantes produisant aussi du CO2 comme sous-produit de leur fermentation. La plupart de ces bactéries non lactiques hétérofermentaires sont d’origine fécale ou tellurique, c’est à dire du sol. Leur présence indique en général que la production, la récolte ou la transformation du lait a pu se faire dans des conditions non hygièniques.
Comme exemples de conditions contrôlées en regard de la production de CO2, on peut penser aux trous produits par Propionibacterium sp. dans le gruyère et l’emmenthal. L’utilisation de bactéries lactiques hétérofermentaires est aussi utilisée dans la fabrication du bleu afin de produire les canaux permettant l’entrée d’oxygène nécessaire à la croissance de la moisissure. Dans l’industrie du lait concentré ou condensé, des bactéries hétérofermentaires thermophiles sont responsables du renflement des boîtes. Ce phénomène signale généralement une appertisation insuffisante.
Production d’alcool
Les levures, microorganismes responsables de la production d’alcool, transforment le lactose du lait en alcool. La principale conséquence est l’apparition d’une odeur levurée ou alcoolisée, souvent associée à la bière ou au pain.
Par contre, la présence d’une odeur levurée, de bière, de pain ou de renfermé dans un lait cru témoigne d’une contamination non contrôlée par des levures.
Production de polysaccharides ou de polypeptides
Certains microorganismes utilisent les sucres ou les protéines du lait pour construire des molécules plus grosses et plus longues appelées respectivement polysaccharides ou polypeptides. On dira de ces microbes qu’ils sont filants, limoneux, texturants ou épaississants.
On utilise la production de polysaccharides ou de polypeptides de façon contrôlée pour améliorer la texture de certains yogourts en augmentant leur viscosité afin d’éliminer ou de diminuer l’addition d’agents gélifiants.
Principaux microorganismes filants ou limoneux associés aux produits laitiers
Pseudonomas (psychrotrophes) Enterobacter
(coliformes, m) Escherichia coli
(coliformes, m) Leuconostoc
(bactérie lactique, hétérofermentaire, m) Lactobacillus
(bactérie lactique, m ou t) Streptococcus
(m ou t) |
Protéolyse
Principaux microorganismes protéolytiques associés aux produits laitiers
Bacillus (p, m, t, td) Pseudomonas (p) Clostridium (p, m, t, td) |
Flavobacterium (p) Alcaligenes (p) Levures et moisissures (p et td) |
Au cours de leurs activités métaboliques, certains microorganismes, grâce à l’action de leurs protéases, utilisent les protéines du lait. Ce phénomène produit la libération de sous-produits très variés, dont les peptides à longue chaîne ou courte chaîne, des acides aminés et des dérivés d’acides aminés. On doit se rappeler que les microorganismes nuisibles en cause sont souvent psychrotrophes.
Si l’activité protéolytique n’est pas contrôlée, on peut alors voir apparaître des goûts amers, des flaveurs non désirées et atypiques ou des textures inadéquates durant l’affinage des fromages.
Lipolyse
Principaux microorganismes lipolytiques associés aux produits laitiers
Bacillus (p, m, t, td) Pseudonomas (p) Clostridium (p, m, t, td) Levures et moisissures (p et td) |
Certains microorganismes, grâce à leurs lipases, peuvent décomposer les matières grasses et les acides gras libres du lait, entraînant l’apparition d’odeurs rances dans le produit laitier. Ils sont fréquemment psychrotrophes et thermoduriques.
Dans les conditions non contrôlées, les principaux effets de cette dégradation sont l’apparition de fortes odeurs et de goût rances causés par des microorganismes contaminants du lait cru.
Tableau de synthèse sur les dégradations d'origine microbienne dans le lait
Actions microbiennes | Répercussions | Groupes et genres microbiens |
|
|
Bactéries lactiques mésophiles (Lactobacillus, Leuconostoc, Lactococcus et streptococcus) |
|
|
Bactéries lactiques mésophiles (Lactococcus
et Leuconostoc)
Bactéries non lactiques mésophiles (Microbactérium, Escherichia, Enterobacter, Clostridium, Bacillus, et les Levures) |
|
|
Bactéries lactiques mésophiles
outhermophiles ( Leuconostoc, Lactobacillus, Streptococcus)
Coliformes mésophiles (Enterobacter et Escherichia) Psychotrophe (Pseudomonas) |
|
|
Bactéries sporulées mésophiles et
thermophiles (Bacillus et clostridium)
Psychotrophes (Pseudomonas,Flavobactérium, Alcaligenes) Les levures et les moisisssures |
|
|
Bactéries sporulées mésophiles et
thermophiles (Bacillus et Clostridium)
Psychotrophes (Pseudomonas) Levures et moisissures |
|
|
Levures psychotrophes et mésophyles |
Classification des principaux microorganismes du lait selon leur importance
On répartit les microorganismes du lait, selon leur importance, en deux grandes classes : la flore indigène ou originelle et la flore contaminante. La flore contaminante est subdivisée en deux sous-classes : la flore d’altération et la flore pathogène.
Flore indigène ou originelle
Flore indigène du lait cru
Microorganismes |
Pourcentage (%) |
Micrococcus sp. |
30 - 90 |
Lactobacillus |
10 - 30 |
Streptococcus ou Lactococcus |
< 10 |
Gram négatif |
< 10 |
La flore indigène des produits laitiers se définit comme l’ensemble des microorganismes retrouvés dans le lait à la sortie du pis. Ces microorganismes, plus ou moins abondants, sont en relation étroite avec l’alimentation, la race et d’autres facteurs Le lait sortant du pis de la vache est pratiquement stérile. Les genres dominants de la flore indigène sont principalement des microorganismes mésophiles.
Flore contaminante
La flore contaminante est l’ensemble des microorganismes ajoutés au lait, de la récolte jusqu’à la consommation. Elle peut se composer d’une flore d’altération, qui causera des défauts sensoriels ou qui réduira la durée de conservation des produits, et d’une flore pathogène capable de provoquer des malaises chez les personnes qui consomment ces produits laitiers. Il semble que la contamination à l’étable soit la plus importante.
Flore d’altération : incluse dans la flore contaminante, la flore d’altération causera des défauts sensoriels de goût, d’arômes, d’apparence ou de texture et réduira la vie de tablette du produit laitier. Parfois, certains microorganismes nuisibles peuvent aussi être pathogènes. L’un n’exclut pas l’autre. Les principaux genres identifiés comme flore d’altération sont Pseudonomas sp., Proteus sp., les coliformes (soit principalement les genres Escherichia et Enterobacter), les sporulées telles que Bacillus sp., et certaines levures et moisissures.
Flore pathogène : comme la flore d’altération, la flore pathogène est incluse dans la flore contaminante du lait. La présence de microorganismes pathogènes dans le lait peut avoir trois sources : l’animal, l’environnement et l’homme.
Les principaux microorganismes pathogènes associés aux produits laitiers sont : Salmonella sp., Staphylococcus aureus, Clostridium botulinum et Clostridium perfringens, Bacillus cereus, Yersinia enterocolitica, Listeria monocytogenes, Escherichia Coli, Campylobacter jejuni, Shigella sonei et certaines moisissures.
Causes possibles de contamination dans le cas des microorganismes mésophiles | Causes possibles de contamination dans le cas des microorganismes psychotrophes |
|
|